Abbé Lucien
Tocan
« J'étais malade et vous m'avez
visité, J'étais en prison et vous êtes venus à moi. »
Ce verset de St
Matthieu illustre les quarante-deux années d'aumônerie au Centre Hospitalier,
et d'aumônerie à la prison, du Père Lucien Tocan.
Avant ses derniers
mois de maladie, il avait accepté d'écrire un témoignage pour le Courrier de la
Fraternité Charles de Foucault, dont je cite ce passage: «Je ne suis qu'un
fantassin de deuxième classe, n'étant ni psychologue, ni moraliste, ni sexologue,
ni théologien. Mon ministère comme aumônier de l'hôpital et de la prison se
termine. Au point de départ, je m'interrogeais: que dois-je leur apporter?
Aujourd'hui, il s'agit plutôt de faire l'inventaire de ce que j'ai reçu. Et
j'ai reçu beaucoup au contact des détenus. Au point de départ, j'étais un
enfant de chœur! Trente ans d'hôpital, surtout le contact avec les mourants et
avec le quartier psychiatrique ont joué un rôle déstabilisant. On en sort,
comme on peut l'être après un passage dans le «collimateur» de Freud. Je me croyais solide, que d'illusions!
J’ai dû en faire l'expérience et en payer mon écot. » Quand il recevait, c'est la personne qui
comptait avant tout pour lui. Il se voulait attentif à chacune, avec ses
problèmes, ses joies, ses souffrances, cherchant des paroles de compréhension,
d'encouragement et d'espérance, sachant poser des actes et des gestes qui
interpellaient et apportaient des lueurs d'espoir à ceux qui n'en avaient plus.
Capable d'auto-critique et de remise en cause, il ne refusait jamais de
débattre, quels que soient les sujets, aucun n'étant tabou pour lui.
Tous ceux, pauvres
et malades, repris de justice et hommes de loi, professions libérales et
artisans divers, athées, rejetés de la société, personnes dites pas fréquentables,
franc-maçon, toutes celles.et tous ceux qui ont eu l'occasion de le côtoyer
sont unanimes pour dire combien le Père Tocan était un homme d'écoute et de
dialogue dans tous les domaines et dans le respect des idées et du vécu de
chacun. Tous ces échanges, toutes ces rencontres l'ont fait cheminer sur sa
route d'homme, de chrétien, de prêtre, sans jamais rien altérer de sa foi
inébranlable qu'il savait nourrir par la lecture de la Parole de Dieu, dans la
célébration de l'Eucharistie, mais aussi par des partages réguliers avec ses
confrères ou lors de session ou de retraites auxquelles il participait. En
découvrant la vie des autres, n'a-t-il pas découvert sa propre vie d'homme «
ordinaire », sa vie de croyant en
Jésus-Christ, et enfin sa vie de prêtre, fidèle à l'Eglise qu'il rêvait « servante et pauvre ». Son franc parlé empreint
de vérité, son érudition et sa foi en faisaient une personne reconnue et
appréciée de tous. Nous pourrions louer encore ses nombreuses qualités, mais
nous savons combien son humilité en aurait beaucoup souffert. Ceux qui le
connaissaient un peu plus savent aussi combien il aimait la bonne table et. ..
les gourmandises ! Père Tocan pour
certains, Lucien pour d'autres, nous sommes venus nombreux vous témoigner notre
affection et notre gratitude, et vous rendre un dernier hommage plein de
reconnaissance, dans la prière, l'espérance et l'action de grâce.
« Béni sois tu Seigneur, pour les yeux qui
s'ouvrent aujourd'hui dans la Terre Nouvelle, ils Te rencontrent, Dieu Vivant.